Genèse de l'histoire de la Bête: un contexte particulièrement sensible.


En France, en Gévaudan, un climat particulièrement tendu à l'époque de la Bête.

Des problématiques politiques.
Les guerres de religion sont apparues en France au 16ème siècle. Loin d'être un phénomène soudain et isolé, elles ne résultèrent pas moins que d'un enlisement profond du pouvoir royal depuis de longues années déjà. Aussi l'opposition à la Couronne se faisait-elle de plus en plus forte, et les frondeurs, de plus en plus nombreux, proportionnellement à la répression des idées nouvelles qui ne cessait de croître.
Les successeurs d'Henri II en leur temps, François II et Charles IX, beaucoup trop jeunes pour assumer seuls l'ordre royal, ne pouvaient donc empêcher la montée religieuse extrémiste en France et ainsi, le clivage entre catholiques et protestants. 
A l'image de cette scission toujours plus marquée, différents clans commencèrent à poindre au haut de l'échelle, parant le phénomène d'un aspect beaucoup plus politique qu'auparavant.
Ayant à leur tête d'anciennes familles souvent très puissantes et influentes, les Bourbon, fidèles à la cause protestante, et les Guise, partisans inconditionnels du catholicisme, vont ainsi s'opposer, de générations en générations. Ce culte de l'opposition durera d'ailleurs jusqu'à l'aube de la Révolution Française, en 1787, année durant laquelle Louis XVI ancrera définitivement l'idée de tolérance religieuse, notamment à l'égard des protestants par la signature de l'édit de Versailles.
Pour les pays frontaliers, les guerres de religion apparaissaient également comme une opportunité d'affaiblir la France plus encore. Ainsi, l'Espagne et l’Angleterre vont-elles essayer de maintenir vif le feu de ces conflits en apportant un soutien militaire et financier aux deux partis qui s'opposent.


Le massacre de la Saint-Barthélemy. François Dubois (1572-1584).


Des enjeux religieux avant tout.
Au-delà de cet aspect politique évident, il ne faut toutefois pas perdre de vue que les guerres de religion étaient avant tout liées, originellement, à des causes proprement religieuses.
Les huguenots, opposés à l'autorité du Pape parmi d'autres principes de la foi catholiques, se heurtent ainsi aux adeptes du catholicisme, désireux de rétablir une certaine "pureté" au sein du Royaume.
Cette volonté, exacerbée par un fanatisme brûlant, conduira ainsi à une véritable frénésie criminelle, aussi cruelle que symbolique. 
Ainsi, le massacre de la Saint-Barthélemy, en 1572, apparaîtra comme un point d'orgue à cette barbarie religieuse. 
On note, au-delà de la cruauté des actes perpétrés, une véritable volonté  d'instaurer la peur par des moyens tout à fait symboliques: les cadavres sont ainsi "arrangés", en plus d'être horriblement mutilés. 
L'édit de Fontainebleau, édité en 1685 par Louis XIV, révoquera finalement celui de Nantes qu'avait signé, près d'un siècle plus tôt Henri IV, et qui accordait aux protestants une certaine liberté de culte.
Devenu, encore une fois, interdit, le protestantisme est de nouveau réprimé: ont alors lieues les dragonnades.


Le "dragon missionnaire": Qui peut me résister est bien fort. Dessin de 1686.


En Gévaudan cévenol.
Cette révocation de l'édit de Nantes suscitera donc de vives réactions, dans le Dauphiné, le Poitou, le Languedoc, et notamment dans les Cévennes où subsistait alors un foyer important du protestantisme.
Au début du 18ème siècle aura donc lieue la fameuse guerres des Cévennes, ou des Camisards. 
L'abbé du Cheyla, qui retient prisonnier des huguenots au Pont-De-Montvert, est sommé par Abraham Mazel de libérer ses otages le 24 juillet 1702. 
L'abbé, en véritable inquisiteur, se livrait sur eux à des actes de tortures. Refusant toute forme de négociations, l'abbé tente de s’enfuir mais est rattrapé et finalement mis à mort.
L'assassinat de l'abbé du Cheyla conduira par la suite à un véritable embrasement des campagnes cévenoles. Des dizaines "d'inspirés", entourés de révolutionnaires armés, massacreront prêtres et autres fidèles catholiques, semant la terreur dans les Cévennes. 
Devant l'ampleur de la rébellion, le Roi demandera l'intervention des troupes. 
Les combats, marqués par des affrontements d'une rare violence, se solderont finalement par la mort des principaux chefs Camisards, et la destruction d'une grande partie des Cévennes, réduite en cendres sur ordre de Basville, le commandant des troupes en Languedoc. 


Le Pont-de-Montvert, où éclata la guerre des Camisards en 1702.


Il résultera de ce conflit un territoire dévasté et passablement aigri par le passage, encore une fois, de la force royale, et la scission entre catholiques et protestants semblait n'avoir jamais été aussi forte dans cette partie du Languedoc.

L'épisode de la guerre des Cévennes n'est pas si distant de celui de la Bête du Gévaudan. 
Si l'essentiel du parcours de la Bête se trouve dans la partie nord du Gévaudan, ce sont les paroisses plus au sud qui ont été éprouvées par la révolte camisard. 

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